Père Michel Pagès | 7 juin 2024
Une fois de plus, Jésus dérange par sa parole et son autorité au point de le dénigrer et de l'accuser en jetant une ambiguïté sur sa personne et sa mission. Les critiques viennent de partout ; « Il a perdu la tête » disent les uns, « C'est par le chef des démons, Béelzéboul, qu'il expulse les démons » disent les autres (Marc 3, 20-35). Et l'accusation est grave : attribuer au diable ce qui vient de Dieu ! On appelle cela, un « blasphème contre l'Esprit ». Ce qui oblige Jésus à préciser sa mission : « Amen, je vous le dis, tout sera pardonné…mais si quelqu'un blasphème contre l'Esprit Saint, il n'aura jamais de pardon ». Nous sommes toujours interpellés par cette affirmation…Le péché qui ne peut être enlevé est d'ordre spirituel, il relève de l'accusation contre les œuvres de Dieu même. Il n'est pas de l'ordre de l'ignorance mais du « refus raisonné de toute action de l'Esprit ». On n'enlève pas un péché sans le désir de recevoir ce pardon et sans aveu de prise de conscience de sa faute. Qui ne s'est interrogé sur les questions que cela pose à sa propre vie ? Qui ne s'est demandé si tel ou tel choix sociétal relevait ou non de ce « refus obstiné et raisonné de l'œuvre de Dieu » en ce monde ? On est en droit de se poser ces questions quand on touche à ce que l'homme porte de sacré. On est en droit de se poser ces questions quand on occulte sa dignité première et fondamentale. On est en droit de résister et d'intercéder pour qu'une prise de conscience advienne. Qu'est ce qui empêche chaque homme de vivre ? Qu'est-ce qui le réduit ou le construit ? Qu'est-ce qui l'aide à grandir et à le rendre solidaire ? Qu'est-ce qui le condamne ou le sauve ? L'Eglise porte une parole qui sauve et cette parole concerne tous les domaines de la vie. Elle « dérange » souvent cette parole, écho de La Parole de Dieu, mais elle n'a qu'un but ; sauver l'homme, le libérer de ses démons et lui montrer une espérance. Nos évêques osent parler plus fort quand le sujet est grave et touche à cette dignité qui va jusqu'au bout. Comment nous situons-nous et comment agissons-nous ?
La mission de Jésus est telle qu'il montre des urgences et c'est ce qu'il fait dans la suite de cet Evangile à propos de sa famille « Qui est ma mère ? Qui sont mes frères ? C'est celui qui fait la volonté de Dieu qui est pour moi un frère, une sœur, une mère »…et il interroge encore : « Si une maison est divisée contre elle-même, cette maison peut-elle tenir ? ». Il est des enjeux qui disent de nos liens, qu'ils sont majeurs et universels comme « la famille humaine toute entière »… Père Michel Pagès, recteur du Sanctuaire