Père Michel Pagès | 11 octobre 2024
Jésus ne fait pas de sociologie pour évoquer le détachement, il parle de liberté. Bien sûr, il y a des pauvres dont il prendra fait et cause, mais dont il dira « les pauvres, vous en aurez toujours avec vous », comme un éternel défi. Mais à ses yeux, le vrai danger c'est la confiance que nous mettons en nous-même ou dans les biens…au risque de tourner le dos au véritable enjeu de la vie humaine. L'évocation de « l'homme riche » (Marc 10, 17-30) est éloquente. Il a tant de qualités ! Peut-être avait-il pensé qu'avec un peu de générosité, il pouvait, à bon compte, s'approcher du mystère de Dieu, de la libération qu'il apporte à ceux qui le suivent. Mais voilà : « Une seule chose te manque, vends ce que tu as et suis-moi ». Et malgré « le regard d'amour » de Jésus dont il est l'objet, « il s'en va tout triste ». Il n'a pas compris que cet appel était un appel à « être libre » de beaucoup de choses et à découvrir un autre chemin. Le regard de Jésus se fait alors plus large « Comme il est difficile à ceux qui possèdent d'entrer dans le Royaume ». Comme il est difficile à ceux qui sont possédés par « quelque chose » de goûter à ce surcroit qu'est la connaissance de Jésus. Allons plus loin. La théologie nous éclaire : « l'occasion de péché naît d'un attachement indu » ! Le péché, c'est être attaché, à l'excès, aux moyens et non au cœur. Dans ce sens, il peut y avoir « des pauvres riches » et « des riches pauvres ». La question des disciples est alors essentielle : « qui donc peut être sauvé ? ». Qu'est-ce qui éloigne de Dieu et de sa promesse ? Qu'est-ce qui nous tient et retient, au point de « passer à côté d'un essentiel » ? Il est un signe révélateur, c'est « la tristesse ». « Le jeune homme s'en alla tout triste ». Bien au-delà de ce qu'on appelle « la crise des vocations » (et cela touche toutes les vocations) il y a la question du sens de ce que nous faisons de notre vie et du prix que nous donnons aux choses, mais aussi la conscience de ce qui peut nous « tenir » ou « retenir », nous « empêcher » d'être vraiment ! Que n'ai-je entendu de « regrets » en accompagnant, des années, des malades ou des fins de vies ! Parfois de « tristesse » à être passé à côté de certaines choses ! Etre libre, c'est la possibilité de devenir ce que nous sommes en vérité, des enfants de Dieu, selon la grâce que chacun reçoit de Dieu et dans sa propre nature. L'Esprit Saint libère des pesanteurs, des craintes, des doutes, des étroitesses, des égoïsmes, et c'est toujours à faire. Mais il suscite la libre confiance…Sommes-nous vraiment libres et comment ? Père Michel Pagès, recteur du Sanctuaire