Nous sommes avertis … mais convertis …

Père Michel Pagès |  3 novembre 2023

« Celui qui s’élève sera abaissé, celui qui s’abaisse sera élevé » (Mt 23, 1-12) C’est la grande et belle tradition de l'Église que de rapporter les faits et les paroles du Maître. Ce qu’il y a de plus édifiant, de joyeux, d’exaltant mais aussi ses appels exigeants et ses leçons de vie. Surtout l'Église connait l’expérience fondatrice du Christ mort et ressuscité, qui nous appelle « à une vie nouvelle ». On peut être troublé par les remarques, parfois radicales, du Maître, mais les tentations, en humanité, sont toujours les mêmes, hier comme aujourd’hui : les ambitions, les jalousies, les divisions, surtout l’orgueil ! Bien sûr il s’adresse aux pharisiens dont nous connaissons les limites, mais à nous aussi, à tout homme appelé à connaitre sa vocation, sa juste place en ce monde…Ah, l’éternelle tentation de l’orgueil, « l’orgueil humain » disent les spirituels. Alors, oui, nous sommes avertis ! Le petit poison de l’orgueil, que le démon a instillé dans le cœur d’Adam est toujours là ! Il se réveille dans le cœur des meilleurs d’entre nous. C’est ce même orgueil qui causa la chute d’Adam jusqu’à nous, dont nous découvrons la mystérieuse cicatrice en nos vies et dont parle Saint Paul : « Je ne fais pas le bien que je voudrais et je commets le mal que je ne voudrais pas (Rm 7, 19) ou encore « Il m’a été donné une écharde dans la chair pour m’empêcher de m’enorgueillir » (2 Cor 12,7). Mais alors, quel est le remède ? St Jean Cassien, (Ve siècle), à Marseille, le modèle de celui qui cherche Dieu en vérité, on dira plus tard le père des moines. Écoutons-le nous parler de l’orgueil : « Extirper l’orgueil en nous est une entreprise qui semble sans espoir. Regardez l’oignon, chaque peau enlevée en cache une autre  et ainsi de suite et sans fin ». Saint Isaac le Syrien (Ve Siècle), un autre chercheur de Dieu disait à sa façon : « L’humilité est le vêtement de Dieu, pas le nôtre ». Un père du désert parle non sans humour ; « Il vaut mieux boire du vin avec humilité que boire de l’eau avec orgueil ». On pourrait même citer ce proverbe indou et sourire ; « Plus le singe grimpe haut et mieux il montre son derrière ». Bref, tout ceci n’est pas accablant, c’est lucide et c’est un appel à « se jeter en Dieu » comme dans les bras d’un Père. L’humilité « humilis » « l’humus » c’est être « à hauteur de notre condition de créature », pas plus haut, pas plus bas. C’est là qu’on peut s’épanouir et grandir « en Dieu » et même sourire de nos futilités. « Apprenez de moi car je suis doux et humble de cœur » dit Jésus…   Père Michel Pagès, recteur