Mgr Georges Pontier | 26 janvier 2025
La lecture de l'évangile de Luc que nous propose la liturgie de ce jour est faite de deux morceaux : le premier reprend le tout début de l'évangile de Luc qui explique que, comme d'autres, il a décidé d'écrire pour son ami Théophile, « un exposé suivi, afin que tu te rendes compte de la solidité des enseignements que tu as entendus. » La liturgie passe ensuite au chapitre quatrième, au tout début de la prédication de Jésus. Il la fait commencer à Nazareth où il avait été élevé. Cela met bien en valeur son intention : Montrer comment la mission de Jésus n'est pas dans l'extraordinaire de la vie mais dans l'ordinaire de nos vies humaines. Celui qu'ils ont vu grandir, qu'ils connaissent bien est plus que ce qu'ils en ont perçu. Il est celui sur qui repose la puissance de l'Esprit : Le passage dont il fait la lecture à la synagogue est tiré du livre d'Isaïe : « L'Esprit du Seigneur est sur moi parce qu'il m'a consacré par l'onction. Il m'a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs la libération, et aux aveugles qu'ils retrouveront la vue, remettre en liberté les opprimés et annoncer une année favorable accordée par le Seigneur. »
Nous qui vivons une année jubilaire nous pouvons être attentifs à cette dernière annonce, celle d'une année favorable accordée par le Seigneur. Nous y reconnaissons la référence à ces années jubilaires que le peuple hébreu connaissait régulièrement dans son histoire, années de conversion, de justice, de changement de cœur, de libération de ce qui alourdit la vie des pauvres. L'envoyé de Dieu vient pour rappeler le projet de Dieu, celui de la liberation des cœurs, celui de la libération de tout ce qui les aveugle, de tout ce qui les empêche d'être fraternels et confiants en Dieu. Et le récit s'achève par ces mots : « Tous dans la synagogue avait les yeux fixés sur lui. Alors il se mit à leur dire : « Aujourd'hui s'accomplit ce passage de l'Ecriture que vous venez d'entendre. »
Gardons, nous aussi, nos yeux fixés sur Jésus et entendons le nous redire en cette année jubilaire, que l'œuvre du salut s'accomplit pour nous aujourd'hui dans le service de la justice, de la libération, de la rencontre du Seigneur. Et cette œuvre commence d'abord en chacun de nous, personnellement et communautairement : Quelle libération peut s'accomplir en moi durant cette année : qu'est-ce qui me rend aveugle ? Quelles sont mes idées bien arrêtées, ou mes peurs, ou mes blessures ou mes ambitions qui prennent toute la place en moi et m'empêchent de voir mes frères les plus pauvres, ceux qui connaissent de graves difficultés ? Ceux que j'enferme dans des paroles définitives : ils l'ont bien cherché, Ils n'ont qu'à travailler, pourquoi ne se bougent-ils pas ? Suis-je de ceux qui se mettent en marche pour que la Bonne nouvelle soit annoncée aux pauvres dans des choses simples de la vie associative pour les rejoindre, les regarder, les entendre, les soulager, pour donner à manger, à se vêtir, pour apprendre à ceux qui en ont besoin la langue de notre pays, pour aider ?
De quoi suis-je captif ? « Annoncer aux captifs la libération » Quelles sont mes addictions secrètes ou plus visibles ? Qu'est-ce qui m'enferme et m'empêche d'être libre, libre au fond de mon cœur, libre vraiment ? De qui ou de quoi suis-je l'esclave ?
Et encore, dans ma relation à Dieu : où en suis-je de ma relation avec Lui ? Qu'est-ce que j'attends de Lui ? : qu'Il m'accorde ce que je lui demande ou qu'il m'introduise dans une relation toujours plus profonde et filiale avec Lui ? Ne pas réduire Dieu à un rôle de secours pour les choses matérielles de la vie, mais entrer dans la joie de se savoir aimé de Dieu et fait pour cet amour ? Est-ce que je suis capable de reconnaître tous les signes de sa présence dans ma vie pour l'en louer ou suis-je toujours en train de demander des interventions extraordinaires pour croire en Lui ?
« Aujourd'hui s'accomplit ce passage de l'Evangile que vous venez d'entendre. » Aujourd'hui s'accomplit l'œuvre de l'Esprit en nous, par nous, pour poursuivre son œuvre de salut, de justice, de pardon, d'espérance. Accueillons son œuvre, soyons-en les serviteurs joyeux et humbles. Mgr Georges Pontier