Homélie du Dimanche 16 Juin 2024

Mgr Georges Pontier |  16 juin 2024

En ce moment où nous traversons un temps marqué par bien d'incertitudes et de troubles en Europe, dans notre pays et dans le monde, nous pouvons légitimement être habités par des sentiments de confusion, de crainte, voire de peurs, surtout si nous pensons à l'avenir de la vie des générations les plus jeunes. Il est bon de nous souvenir que c'est dans un monde troublé également que la Parole de Dieu a retenti en Palestine, dans la bouche de Jésus de Nazareth, dans sa vie, dans son apparent destin. L'empire romain étendait sa zone d'influence, ses ambitions provoquaient troubles, compromissions et oppositions. Et voilà que Jésus entreprend la deuxième partie de sa vie après 30 années d'une vie ordinaire dans le village de Nazareth en compagnie de Joseph, de Marie et de ses concitoyens. Le voilà désormais sur les routes de la Galilée, annonçant le Règne de Dieu en train d'advenir. Il utilise pour cela de nombreuses paraboles dont la plus profonde et réelle est celle de sa vie et de sa mission. Le règne de Dieu ne se présente pas comme les règnes de ce monde. Sa croissance, comme celle d'une semence enfouie dans la terre, échappe à toute maitrise humaine. Il se développe d'une manière imperceptible et immaitrisable. Entre l'enfouissement de la semence et la récolte du fruit se déroule un processus invisible que personne ne maitrise. Entre l'enfouissement de la petite graine et la taille de l'arbre qui viendra, point de comparaison ! Il y a démesure.

Le royaume de Dieu n'est pas du même ordre ni de la même logique que ceux des hommes qui veulent dominer et maitriser toute chose. Il est de l'ordre de l'enfouissement, du travail caché de Dieu, de la démesure entre les commencements et son terme à venir. Et c'est bien cela qu'explique Jésus à ses disciples, en les prenant à part. Les conduire à entrer dans la compréhension de ce qu'Il est : cette semence enfouie dans la terre des hommes pour y semer la graine qui portera son fruit à travers un cheminement caché mais bien réel. Il s'est enfoui trente ans à Nazareth. Il va s'enfouir encore en vivant trois années de vie proche des petits, des pauvres, des malades, des étrangers, passant sur les routes de Galilée en faisant le bien, comme le dit Pierre dans son discours de Pentecôte. Et ce chemin d'enfouissement dans la terre des hommes semblera se terminer par une mort lamentable et le triomphe de ceux qui croient pouvoir tout maitriser par la puissance et la force. Or voilà que la semence porte son fruit de vie plus fort que celui de la mort, son fruit d'amour plus fort que la haine, son fruit de paix plus fort que celui des violences diverses. Il est ressuscité des morts et poursuit son œuvre dans le cœur des hommes et des femmes par son Esprit à l'œuvre en chacun. C'est là que se passe le travail de la semence enfouie en terre des hommes pour porter son fruit de fraternité, de solidarité, d'espérance et de vie éternelle. Et déjà les disciples enseignés par Jésus ont pu voir les premiers fruits dans l'ouverture des cœurs et la conversion de beaucoup.

Chers frères et sœurs, nous sommes les témoins émerveillés de l'œuvre de Dieu en Christ et les témoins espérant et actifs de l'œuvre de son Esprit en ce temps qui est le nôtre. Oui, en nous-mêmes et dans la vie de beaucoup, la semence semée en terre des hommes par le Christ suscite des artisans de paix, des acteurs de solidarité, des porteurs d'espérance, des bâtisseurs d'avenir, en sachant que l'arbre à venir au-delà de notre existence terrestre poursuit sa croissance invisible jusqu'au jour où le Christ reviendra conduire à sa plénitude le règne de Dieu dans le cœur de tous et de chacun. Alors il sera tout en tous.  « En attendant, comme l'écrit l'apôtre Paul, notre ambition, c'est de plaire au Seigneur. » Mgr Georges Pontier