Mgr Georges Pontier | 12 novembre 2023
Nous sommes comme ces jeunes filles de la parabole, nous qui entendons à chaque Eucharistie l'invitation du Seigneur : « Heureux les invités au repas des noces de l'Agneau. » Comme elles, nous sommes invités au repas des Noces, à la rencontre festive le jour et l'heure venues. Nous sommes des invités. Cette parabole nous le rappelle tout en insistant sur le fait qu'il ne suffit pas d'être des invités, encore faut-il être prêts pour le jour et l'heure que nous ne connaissons pas. Voilà notre part ou notre responsabilité : être prêts, avoir prévu ce qu'il faut pour le moment, le grand moment : celui de la venue de l'époux. Il est là. Ai-je bien préparé tout ce qu'il faut pour le suivre et entrer à sa suite ? La préparation de ce moment a -t-elle eu une place dans ma vie ?
Je me souviens avoir lu ce récit de la vie d'une famille durant une des guerres que notre pays a connues. L'époux, le papa avait été réquisitionné et était parti pour la guerre. Mais on attendait son retour, on l'espérait, on y pensait, on préparait tout pour ne pas être surpris. Et la maman avait donné cette consigne aux enfants qui mettaient la table deux fois par jour : « mettez l'assiette de votre père. Il faut qu'il voit que nous l'attendions s'il frappe à la porte pendant que nous mangeons. » Il est bien normal de poursuivre sa vie, de manger, de dormir, de travailler, de s'assoupir s'il tarde à venir. Il est bien normal de faire tout ce qu'il y a à faire. Mais il faut en même temps prévoir sans cesse son retour, son arrivée, sa venue. On ne va pas vivre comme ceux qui n'attendent plus rien, comme des désespérés. Il a une place dans notre cœur, qu'il ait une place dans notre vie !
La voilà la réserve d'huile que les prévoyantes avaient toujours avec elles quoiqu'elles fassent : l'espérance du retour de l'époux, du père. « Nous attendons ta venue dans la gloire », nous fait chanter la liturgie. Ou encore : « Nous qui attendons cette bienheureuse espérance : l'avènement de Jésus-Christ, notre Sauveur » dit désormais le célébrant à chaque eucharistie dans la prière qui suit la récitation du Notre Père.
A quoi voit-on que nous attendons la venue de quelqu'un dans notre vie, que nous ne vivons pas que pour nous-mêmes, qu'il y a place pour quelqu'un dont nous attendons le meilleur, la présence, le retour ? Quelle est cette huile dans notre paquetage, toujours là, jamais oubliée ? Elle peut être diverse selon chacun de nous. Ce sera surement celle de la prière personnelle et avec les autres qui comme nous, attendent ce retour, cette venue ? Notre présence ce matin en est un exemple. Ce sera encore ces signes dans nos maisons sur les murs ou les meubles, ces moments de prière familiale. Ce sera notre manière de vivre, de décider, de choisir comme s'il était là, suivant ses conseils, choisissant ce qu'il choisirait s'il était là. Nous savons ce qui lui plairait et nous le faisons. Et il y a bien sûr le souci des petits, des souffrants, des malades, de tous les frères. Il y a les pardons donnés, les paroles et les actes en faveur de la paix, du réconfort, de l'encouragement. Il y a encore la lecture de ses lettres, de la parole de Dieu. Il y a la pensée du cœur, le nom prononcé, le sourire retrouvé. Que sais-je encore ? En tout cas, autre chose que le repli sur soi ou l'oubli de celui qu'on aime, ou encore le remplacement dans notre cœur par des citernes fissurées, comme disait le prophète, qui donnent l'illusion momentanée de pouvoir combler nos soifs et qui se révèlent décevantes !
Se tenir prêt, avoir prévu le retour du Maître, sa venue, son passage. C'est éclairer chacune de nos journées d'une présence qui réjouit, réconforte, apaise, fortifie. C'est vivre de son Esprit, dans son Esprit.
Demandons à Marie qui gardait les paroles et les actes du Seigneur dans son cœur, les méditant, les laissant porter leurs fruits, demandons-lui de soutenir notre espérance, de prier chaque jour pour nous et à l'heure de notre mort.
Amen