Père Michel Pagès | 5 janvier 2024
Le moins qu’on puisse dire c’est que la venue des mages ne fait pas l’unanimité et que la joie qu’ils apportent « d’ailleurs », à la venue de « cet enfant », n’est pas tout à fait celle « des locaux » : « en apprenant cela, le roi Hérode fut pris d’inquiétude et tout Jérusalem avec lui » (Matthieu 2, 1-12). Cela ne vous rappelle rien ? De la même manière, au moment de sa vie publique comme aux heures de sa passion, Jésus suscitera « la même inquiétude »…Voici donc que, celui qui rejoint son peuple, est ressenti comme une menace, une inquiétude. Le langage des mages ajoute à l’inquiétude : « Où est le roi de juifs qui vient de naître, car nous avons vu son étoile et nous sommes venus nous prosterner devant lui ? ». Pour eux, mystérieusement sa personne attire, leur science mystérieusement les y conduit, « il est roi » et leur parole ajoute encore à la peur de ceux qui exercent le pouvoir en Israël. C’est donc bien un fait, Jésus dérange et bouscule ! Comme elle proche cette naissance « en notre chair » et pourtant comme elle semble éloignée la « paix de la nuit de Noël », comme il paraît loin l’émerveillement de beaucoup à l’heure de sa naissance ! Comment, alors, entendre cette fête de « l’Epiphanie », fête de « la Manifestation » large du message du Christ au monde ? Sans doute comme l’affirmation claire que le message du Christ est pour tous et pour toutes les cultures puisqu'on vient de loin pour le connaître et que nul n'en est, d'emblée, exclu. Mais aussi qu’il ne cesse de déranger ou d'interroger les valeurs que porte le monde. Nous sommes parfois inquiets sur l’avenir du monde, sur ses choix, ses évolutions, Nous pouvons parfois être soucieux de l’accueil du salut que Jésus apporte et le refus d'un grand nombre. Est-ce si inquiétant ? Pas vraiment, puisque c'est Jésus qui « travaille ce monde » et que c'est une œuvre bonne ! Mais peut-être faut-il nous demander si nous sommes de ceux qui se réjouissent de la venue de Jésus en nos vies ou pas vraiment ? Et, en même temps, prendre acte que Jésus est venu bousculer toutes choses qui sont « du monde » alors qu’il vient nous dire que « nous sommes de Dieu » ! Peut-être faut-il ne pas nous en inquiéter trop mais grandir dans la fidélité à sa personne, à son message, à ses promesses et nous en réjouir. Plus les historiens avancent dans la recherche du Jésus historique et plus ils sont conscients qu'il échappe à toutes les caricatures mais qu'il demeure force de conversion et d'enthousiasme. Est-ce si vrai pour chacun de nous ? Père Michel Pagès, recteur du Sanctuaire