Père Michel Pagès | 28 mars 2025
Que savent-ils véritablement, ces « deux fils », de leur père ? Sans doute, comme nous, pas assez. Il faut au plus jeune, revendiquer une liberté, quitte à la gaspiller et faire l'expérience d'une errance. Il faut à l'ainé, se replier puis ouvrir les yeux sur ce père qu'il côtoie tous les jours mais qu'il ne connait pas vraiment. Ces expériences-là, elles nous rejoignent sur nos chemins d'humanité et, au-delà, sur notre vocation à connaître notre Père du ciel. Il y a bien des nuances dans chacune de nos vies, mais nous pouvons être ou avoir été l'un et l'autre fils. Il y a des attitudes, des positionnements, des limites, qui empêchent parfois aux uns et aux autres « d'être fils ou fille », de se savoir aimé et capable d'aimer à son tour. Claquer la porte, vouloir vivre sa vie, c'est connu et ça arrive tous les jours dans les relations humaines. Se replier, ne rien voir, parce qu'on est trop proche et qu'on n'a rien à se dire, ça arrive aussi tous les jours. La vie est ainsi faite qu'on peut vivre ces réactions et chercher encore sa place en ce monde. La parabole de Jésus, tout en éclairant nos liens humains, vient nous apprendre nos liens divins, ce qu'il y a d'existentiel en nous et qui nous permet de vivre. Un père reste père et il peut le montrer enfin, quand son fils revient de son errance et de sa fuite et quand un autre le regarde enfin. Dieu reste Dieu, même si, un temps, on s'éloigne ou on le rejette. Il attend notre retour vers lui pour déployer enfin, ce qu'il est. Plus encore, en faisant tout pour que son fils prenne la mesure de son amour : « festin, veau gras, bague, beau vêtement, musique, baiser » (Luc 15, 1-32). Jésus, lui, « le fils unique », est venu nous apprendre à « être fils ». Savons-nous cela ? Avons-nous vécu cela ? Sommes-nous prêt à le vivre ? Car, de cette expérience, naît notre rapport à Dieu lui-même, lui le Père de toute créature, lui la source de la vie qui nous appelle à sa vie. Il est des périodes en chacune de nos vies où ce questionnement est incontournable. On a pu s'éloigner, gaspiller ou se renfermer pour enfin découvrir, prendre la mesure de notre vocation sur cette terre. De cette filiation essentielle, enfin comprise, et que nos filiations humaines ont vocation à révéler, notre bonheur dépend. Trouver la source, se savoir désiré et aimé, attendu, c'est essentiel, pas si simple, mais vital ! Se laisser atteindre par cet amour est un trajet parfois long et mouvementé mais que c'est bon de « rentrer à la maison » et de se laisser accueillir par les bras d'un père. Quel est votre chemin pour vous savoir enfin fils ? Père Michel Pagès, recteur du Sanctuaire