Ce récit évangélique (Luc 3, 1-6) exprime avec réalisme le contexte où Jean Baptiste, prêche. Il prêche, dans le temps concret des hommes, « un baptême de conversion ». Sa prédication ne se contente pas de « dénoncer » mais « il annonce » ! Le premier critère de celui qui « annonce » c'est de ne pas se mettre en avant mais par sa parole et par ses actes, de « préparer un chemin » pour le Seigneur qui vient, puis de s'effacer. Quelle leçon pour tous ceux qui ont vocation à « annoncer » en ce monde où nous sommes ! Je sais comme vous, qu'ils ne manquent les sujets polémiques en nos sociétés où, en conscience, on se doit de « dénoncer » et chacun peut faire sa liste. Mais on n'avance guère quand on se contente de dénoncer ! Il nous faut, en tout sujet, mettre une bonne dose de patience et d'espérance, sans juger trop vite, sans exclure trop vite, sans se donner comme modèle trop vite. On comprend, dès lors, la prédication de Jean Baptiste quand il annonce celui qui vient « chercher et sauver ce qui est perdu », celui qui vient « faire la vérité ». Les râleurs se repèrent vite mais ceux qui annoncent un renouveau, bien davantage…Je pense à la jeune Bernadette Soubirous, accablée de toute part sur la véracité de sa vision de Notre Dame et qui finit par s'exclamer : « je ne suis pas chargée de vous le faire croire, je suis chargée de vous le dire » manière de s'effacer devant le message. Le curé d'Ars savait donner des conseils pratiques aux pénitents nombreux et râleurs pour inviter à un changement de vie mais il ajoutait aussitôt « le maître fera le reste, c'est-à-dire l'essentiel ». Ceux et celles qu'on appelait « missionnaires » savaient débroussailler pour préparer, avant d'annoncer le Christ Sauveur. En ces temps où nous sommes « tous missionnaires », que faut-il « débroussailler » et « préparer » avant d'annoncer ? Des désirs, des préjugés, des intérêts, des regards, des jugements ? Interrogeons – nous sur votre manière d'être chrétien là où nous sommes…Peut-être en commençant par comprendre que tel comportement construit et que tel autre détruit…Peut-être en prenant conscience qu'un chemin de mensonge éloigne et qu'une vérité guérit…Peut-être en expérimentant que tel choix est une illusion et que tel autre est une lucidité…C'est le témoignage personnel qui construit, pas les jugements a priori…qui fait que l'on peut accueillir les douleurs et les révoltes des autres mais en se tournant vers Dieu qui peut tout…La conversion est un acte éminemment positif et solidaire…Y croyons-nous ? Le vivons-nous ? On disait des chrétiens des premiers siècles: « voyez comme il s'aiment »…Père Michel Pagès, recteur du Sanctuaire