3e Avent Année A

Père Christian Teysseyre |  11 décembre 2022

Jean Baptiste dans le désert était un prophète annonciateur couru.  Sa parole sûre portait. Son audience et sa renommée étaient grandes. Ses certitudes concernant la proximité du royaume des cieux le guidaient. Il a conforté la foi du peuple. Il y avait même une véhémence dans ses propos dénonçant les faux fuyants et les lenteurs, invitant à une conversion radicale. La clarté et la force de son propos rencontraient une attente. C'était un homme de ferveur qui suscitait l'effervescence populaire. Son cri trouvait un écho.

Voici que tout change quand il est dans sa prison. Tout lui échappe. Il ne voit plus rien. Qu'en est-il du royaume de Dieu dont il percevait la venue ? Qu'en est-il de Jésus qu'il avait désigné comme l'Agneau de Dieu. C'est l'incertitude, et vraisemblablement le doute corrosif. Il n'a aucun repère qui lui donnerait quelque assurance sur ce qu'il croyait. Ce qu'il entend dire de Jésus et des œuvres que celui-ci accomplit semble le trouver démuni. Tout lui échappe. Sa vision se trouble. Il n'a plus la certitude qui l'habitait précédemment.

Il demande à Jésus de s'expliquer et de positionner. Que les choses deviennent claires enfin !

Il lui fait demander par des disciples : « Es-tu celui qui doit venir ou devons-nous en attendre un autre ? »

En miroir, nous n'avons de peine à retrouver dans cette étape de la vie du Baptiste notre propre itinéraire, comment à un moment donné, nous nous trouvons désarçonnés dans nos raisons de croire, gagnés par l'incertitude, nous interrogeant sur la pertinence de ce que nous avons cru et sur nos engagements. D'ailleurs c'est le parcours même de l'humanité qui est indiqué se retrouver dans ce passage onéreux comme des philosophes de l'histoire ont voulu le voir et le démontrer dans une critique du christianisme, en déroulant une succession d'âges de l'humanité, passages obligés. Ce type de lecture apparaît dès le VI siècle (Damascius) et connaît son apogée au XIXe siècle…

Que répond Jésus aux émissaires du Baptiste ?

Il reprend une prophétie d'Isaïe, qu'il met au présent, la déclarant actualisée. « Allez annoncer à Jean ce que vous entendez et voyez » (ce que chacun peut constater)

« Les aveugles retrouvent la vue, les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés… les pauvres reçoivent la Bonne Nouvelle »

On retrouve là d'ailleurs le texte du prophète que Jésus avait lu dans la synagogue de Nazareth. Jésus avait commenté le texte en disant seulement : « C'est aujourd'hui que cette parole s'accomplit ».

C'est cela que Jésus confirme et donne à voir et à entendre désormais.

On peut se demander comment Jean le Baptiste n'a pas su voir et entendre ce qu'on lui rapportait… comme on peut se demander pourquoi et comment, nous aussi, de même, il nous arrive d'être plongés dans l'obscurité, dans l'incapacité de lire et recevoir les signes du passage de Dieu dans nos vies. Jésus a cette parole qu'il reprendra dans d'autres circonstance : « Heureux celui pour qui je ne suis pas une occasion de chute ».  Jésus perçoit bien que la foi est toujours à donner et qu'elle n'existe pas sans rencontrer le doute. Le doute à traverser.

Jésus répond indirectement au Baptiste, comme il le fera fréquemment, renvoyant à ce qui demande à être lu, reconnu.

Jésus ne révèle son identité qu'au bout du chemin parcouru par chacun pour le connaître. Jean Baptiste a reconnu le messie, mais ne connaît pas encore le Christ personnellement ! Il a bien perçu la place de Jésus, mais il est resté tributaire de la vision messianique de son temps, un messie triomphant et justicier. D'où ses questions insolubles.

Jean Baptiste, le messager précurseur, est invité à une foi plus profonde.

Jésus dit cependant clairement que celui qui doit venir est déjà là !

Nous avons à nous ouvrir à ce déjà là. Quels signes le Christ nous donne-t-il de sa présence, de sa venue aujourd'hui dans nos vies et dans notre monde ? Savons-nous les voir ? Quels sont les obstacles qui, en nous, nous empêchent de les recevoir et de reconnaître le Christ ?  Comment avançons-nous par-delà nos incertitudes et nos doutes ? dans le risque de la foi, au cœur même de l'obscurité ?

A nos interrogations, le Christ nous dit ce qu'il ne cesse d'accomplir.

Cela nous demande d'ouvrir nos yeux et nos oreilles.

Je vous propose un point d'attention : Cette semaine, de quoi serons-nous témoins ? Qu'accueillerons-nous du Christ ?